
Rémi BOMONT est un Lorrain né à Nancy en 1986. Issu d’une filière scientifique, il a entretenu sa jeunesse durant une rivalité cordiale avec la littérature. Trop énergique pour se poser devant un livre, il fut le premier surprit de découvrir sa passion pour l’écriture, à l’âge de 17 ans et y trouva ce qui lui échappait dans la lecture. Quinze ans durant, il peaufina son univers, le réécrivant plusieurs fois successivement. Il tenta l’autoédition une première fois, puis un bout de chemin avec les éditions des Mots qui Trottent, pour enfin se lancer et se professionnaliser dans une autoédition de qualité.
Interview datant de 2020
INTERVIEW ORGANISÉE PAR MISS ALINE:
Miss Aline : Merci de me prêter un peu de ton temps pour répondre à cette interview. Peux-tu commencer par te présenter aux lecteurs
Rémi : Je m’appelle Rémi BOMONT. Je suis auteur de fantasy aux éditions des Mots qui Trottent et le créateur de la saga Legendion dont les deux premiers tomes sont disponibles. Plus personnellement, j’ai 33 ans, je suis père de deux garçons de 9 et 12 ans et j’accomplis le métier d’aide soignant auprès de personnes en situation de polyhandicap.
Miss Aline : comment et pourquoi es-tu venu à l’écriture ?
Rémi : Pour exprimer une créativité enfouie en moi. De toutes les activités que j’ai réalisé dans ma vie (et il y en a beaucoup, car je ne tiens pas en place), l’écriture est la seule dont je ne me suis jamais lassé. C’est ma constance dans mes cycles de changement. Quand j’écris, les pensées se taisent, mes mains deviennent l’extension de mon esprit. C’est peut-être une forme de méditation. En tout cas, j’avais 17 ans lorsque j’ai commencé à écrire. Rien ne m’y destinait. Je boudais la littérature, je lisais très peu (et c’est encore le cas). J’ai écris par nécessité. C’était le seul support créatif à ma portée. Ça m’a prit d’un coup, au détour d’une grippe durant la canicule de 2003. Un stylo du papier et bonjour l’écriture.
Miss Aline : Pourquoi la Fantasy ?
Rémi : Parce que c’est le seul genre qui ne nécessite pas de connaitre parfaitement l’époque. J’ai écrit par évasion, je n’avais rien à raconter dans le monde contemporain. La SF ? Pas assez calé en science. Le polar ? J’en ai horreur. L’Historique ? Pas assez connaisseur. Je ne me vois pas parler d’une époque à l’aveugle, sans connaître l’état d’esprit d’une personne de l’époque, sa culture, sa vision du monde. D’autres et le font, certains y arrivent, mais moi pas. J’ai besoin de contrôle sur ce que j’écris. Quelle meilleur façon de l’avoir que de fixer moi même les règles, de créer un monde où je peux définir la culture, le mode de vie, le fonctionnement des gens ?
Miss Aline : Ecris-tu tous les jours ? As-tu des rituels ? Même lieux, mêmes horaires, musique, etc. ?
Rémi : J’aimerais bien. Ecrire chaque jour. Entre la vie de famille, le travail et la fatigue, ce n’est pas toujours possible. Pour ne pas perdre le fil, je m’oblige à écrire à chaque pause à mon travail, 20 minutes minimum. La frustration est là, j’ai besoin d’écrire. Heureusement mon métier, avec ses horaires décalés, me permet de dégager des matinées ou des après-midi. Les enfants à l’école, j’avance. Niveau rituel, j’essai de ne pas trop en dépendre. Ils sont souvent un prétexte pour ne pas s’y mettre. Quand j’ai vraiment l’inspiration, je peux écrire à côté de mes enfants, télé allumée. D’autre fois, il me faut le silence complet. Globalement, j’adore sortir pour écrire. Aller dans un lieu public. Ressentir la vie, sans qu’elle ne vienne me déranger. Je devrais le faire pour souvent.
Miss Aline : L’inspiration parlons-en. Comment t’es venu l’idée de Legendion ?
Rémi : L’univers est né bien avant l’écriture. Une amie dessinatrice me l’avait demandé, mais ne s’en est pas servie. J’ai cherché comment faire du neuf dans un monde d’opulence artistique. Je ne voulais pas partir sur quelque chose de si étrange que l’originalité me coûterait l’accessibilité. J’ai donc gardé une base humaine, peu de race. Je savais qu’une culture énorme existait en fantasy et je n’en connaissais que la surface. Impossible de parler d’elfes et compagnies. Il y a bien des nains, mais ceux qui ont lu le T2 savent… et attendent des réponses. Rapidement, j’ai envisagé de mélanger l’espace et le temps. De partir sur un univers où l’espace rend des comptes au Temps. Mes « Echos » viennent de là. Quant à la magie, je l’ai interdite comme une évidence. J’aime la magie, mais souvent, elle ne sert que l’histoire, comme un deus ex machina pour sauver une situation et on se dit « mais pourquoi tu l’as pas utilisé avant ». Alors je l’ai rendue rare et surprenante.
Miss Aline : J’ai adoré ton espace temps très original. Comment travailles-tu tes personnages, tu fais des fiches ?
Rémi : Aucune fihe. Elles ne me servent à rien. J’ai déjà essayé. Je ne les relis jamais. Je gère l’intégralité de mon histoire dans ma tête. Pas de frise, pas de fiche, pas de mémo. J’avoue que ça devient difficile. Par exemple, pour le T3, l’Echo Ocaria approche, et j’ignore exactement combien de jours séparent mes personnages de celui-ci. Je vais devoir reprendre mes deux premiers tomes et relire pour les compter. Parfois aussi, je dois retrouver un détail physique qui m’échappe. Un fiche m’aiderait, j’y céderai tôt où tard.
Miss Aline : Comment se passe ton quotidien : tes personnages sont sans cesse avec toi (dans ta tête) ou lorsque tu n’es pas en phase d’écriture, ils n’existent pas ?
Rémi : ça dépend des périodes. Par moment, mon esprit a un pied permanent dans mon monde, ce qui fait damner parfois mes proches ou mes collègues. Mais après une intense période immergé, je suis en « down », un terme que j’utilise pour qualifier le vide créatif, l’incapacité à plonger. La passerelle vers mon monde et mes personnages est rompu et durant quelques jours, je suis seul. J’adore mes personnages, ce sont mes amis et je vis auprès d’eux depuis 15 ans. Ils me rassurent. Je ne me sens bien qu’en équilibre entre mon monde et le réel.
Miss Aline : Eloran, Lerena… De tous tes personnages lesquels est le plus proche de toi (personnalité, caractère…) ?
Rémi : A la base, je l’ai construit comme une meilleure version de moi. Celui que j’aurais voulu être. Avec du recul, nous sommes assez différent, mais est-ce si surprenant avec le passé qu’il transporte ? Néanmoins, dans sa quête du héros, il y a une grande part de mon rêve d’enfant, lorsque je me cherchais moi-même et fantasmais sur qui j’étais. Avec la dernière réécriture, j’ai grandement développé Lerena. Je me sens très proche d’elle aussi. Comme une amie intime. Il m’arrive de rêver d’eux.
Miss Aline : Lerena, déjà dans le tome 2 prend de l’envergure. Toi qui es père et auteur, as-tu cultivé auprès de tes enfants l’art de « rêver », de croire en l’imaginaire ?
Rémi : Ironiquement, je suis très terre à terre. Dans la vie réelle, je me focalise sur les faits. Je suis très Cartésien. L’imaginaire est une part très intime de moi, que je ne partage qu’indirectement par la lecture de mes ouvrages. Je pense surtout les conduire à s’instruire et réfléchir. Ils sont d’ailleurs très cultivés en matière de science. Cependant, chacun à leur façon, ils sont créatifs. Mon plus grand écrit aussi son livre. A 11 ans, il prend plaisir à passer une heure devant son ordinateur à continuer son histoire. Mon plus jeune est plus manuel. Il construit des choses. Il a commencé avec les legos, puis a découvert Minecraft et s’est mis à bâtir des châteaux, des cités, des bases secrètes. Il ne se lasse jamais de construire, construire. L’imagination prend bien des chemins.
Miss Aline : Es-tu sur d’autres projets d’écriture ?
Rémi : Oui, j’ai un autre livre en cours d’écriture, rangé et attendant une occasion d’être achevé. Une idée plus récente, une histoire fantastique et contemporaine. Elle est semi autobiographique, dans le sens où Cassandre, le personnage principal partage avec moi bien de traits de caractère et des expériences de vie. C’est un livre qui parle du pouvoir de l’imagination, un hommage que je fais à cette merveille qui a coloré ma vie. Evidemment, l’émotion y sera fortement présente, c’est un peu ma marque de fabrique. Je suis hypersensible.
Miss Aline : Alors je te rends ta liberté. Un très grand merci pour le temps que tu m’as consacré. Et vivement mai 2020 !